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In the Navy, tome 2 : MitchBonus

  • Photo du rédacteur: A.J. Orchidéa
    A.J. Orchidéa
  • 2 nov. 2024
  • 7 min de lecture

Alors que les souvenirs d'enfance ressurgissent pour hanter le présent, Mitch se retrouve figé dans une rétrospective sombre, face à une scène qui l'a irrémédiablement transformé. L'innocence d'un chaton se heurte à la violence de cet instant, capturé ici dans une image troublante. Plongé dans les ténèbres de son passé, Mitch revit ce souvenir glaçant : Hadès, un petit chat noir, symbole d'une pureté qui marqua la fin de la sienne. Cette image intense donne corps à ce moment clé de sa vie, où l'innocence rencontre la cruauté dans un face-à-face brutal.


Bonne lecture !

⚠️ Ne pas lire si vous n'avez pas encore lu le roman⚠️


Scène qui s'intègre à la fin du chapitre 13

Je sens la vie s’échapper de mon corps. Chaque souffle devient plus court, chaque battement de cœur plus lent, comme une horloge qui s’arrête. Étendu par terre, dans le froid, à la frontière entre la conscience et l’oubli, un souvenir resurgit soudain, implacable, comme une lame rouillée qu’on enfonce dans une vieille plaie. J’avais dix ans. Mais en cet instant, le passé se superpose au présent avec une netteté troublante. Les images défilent sans que je puisse les arrêter, des flashs violents et décolorés, comme des fragments projetés dans mon esprit épuisé.


Chaque détail est gravé dans ma mémoire comme des cicatrices indélébiles. Alors que je sens la chaleur quitter peu à peu mon corps, ce souvenir s’accroche à moi, refusant de me laisser partir en paix. Tout se rejoue devant mes yeux avec une précision cruelle : le froid mordant de cet automne, le parfum humide des feuilles mortes, et surtout ce regard – ce regard bleu, plein de vie et de peur à la fois. Je n’étais qu’un enfant, mais ce jour-là, une partie de moi s’est brisée, laissant place à quelque chose de plus sombre, une ombre qui ne m’a jamais quitté.


Maintenant, alors que l’obscurité m’envahit, ce souvenir me consume. Ce ne sont ni les erreurs ni les regrets qui me hantent, mais ce moment où j’ai découvert ce que cela signifiait de prendre et de détruire. Ce souvenir, aussi vif qu’une plaie ouverte, me serre la gorge et me rappelle que c’était ce chaton – ce fragment d’innocence – qui a marqué le début de ma chute. C’est à cet instant précis que l’enfant que j’étais a cessé d’exister. Et tandis que je sombre, c’est cet enfant que je retrouve, avec une lucidité glaçante, incapable de fuir ce que j’ai laissé derrière moi.


Sans que je ne puisse l'empêcher, je laisse les images déferler derrière mes paupières closes, s'étirant en larges panoramas, comme si mon esprit diffusait un vieux film en technicolor, chaque détail vibrant et cruel, impossible à échapper.


Début du flashback

Je me souviens encore du jour où je l’ai trouvé, ce petit chat noir, tout seul, recroquevillé sous une pile de feuilles mortes derrière le vieux garage. Il faisait froid, mais son pelage d’un noir de jais, semblable à une ombre mouvante, semblait absorber la chaleur du soleil qui perçait à travers les branches nues. Ses yeux, deux perles bleues brillantes, me fixaient avec une curiosité mêlée de méfiance, un contraste saisissant avec la noirceur de son pelage. Je me suis accroupi, tendant la main, et il a hésité, ses petites pattes enfoncées dans les feuilles comme s'il cherchait à se fondre encore plus dans le sol. Puis, timidement, il s’est approché, sa langue rose pointant brièvement hors de sa bouche, comme pour goûter l'air. Quand je l’ai pris dans mes bras, son petit corps frémissait légèrement, une chaleur fragile émanant de lui alors qu'il cherchait à se blottir contre ma poitrine. À cet instant précis, j’ai su qu’il serait mon secret. Je l’ai surnommé Hadès, comme le dieu des Enfers, peut-être à cause de cette noirceur insondable qu’il portait en lui, ou à cause de la solitude qui transparaissait dans ses grands yeux bleus, comme une porte vers un monde caché que personne ne devait découvrir.


Pendant des semaines, j’ai réussi à le dissimuler. Je l’avais installé dans un coin de ma chambre, derrière un vieux meuble où personne ne regardait jamais. Chaque jour, je le nourrissais en cachette, partageant avec lui mon déjeuner, et la nuit, je l’entendais ronronner doucement, un bruit apaisant qui m’aidait à oublier les cris de mon père de l’autre côté du mur. C’était mon ami, mon unique allié dans cette maison où le silence pesait comme une menace permanente.


Mais un soir, alors que je rentrais de l’école, j’ai su que quelque chose n’allait pas. La porte de ma chambre était ouverte, et en entrant, je l’ai vu. Mon père se tenait là, son visage déformé par une colère que je ne lui connaissais que trop bien. Hadès se tenait sur le lit, les poils hérissés, prêt à fuir.


Mon père a hurlé, sa voix remplissant l’espace étroit :

— Qu’est-ce que c’est que ça, Mitch ?! Tu es complètement stupide ou quoi ?! Tu as ramené cette saleté chez moi ?!


Il s’est approché d’un pas rapide, et je me suis figé, le cœur battant à tout rompre. Ses yeux étaient injectés de rage, et chaque mot qu’il crachait était comme une lame froide qui s’enfonçait dans ma chair.

— Tu n’es qu’un bon à rien ! Un incapable !


Il m’a attrapé par le bras, me secouant avec une violence qui m’a coupé le souffle.

— Tu as intérêt à te débarrasser de ce foutu chat ! Je ne veux plus jamais voir cette pourriture ici, compris ?!


Ses doigts s’enfonçaient dans ma peau, et son visage était si proche du mien que je pouvais sentir son souffle, chaud et acide, comme une menace.


Il m’a jeté en arrière, me laissant vaciller, le regard rempli de mépris, comme s’il me détestait autant que l’animal qu’il venait de condamner.

— Fais-le disparaître, Mitch. Sinon, c’est toi que je vais foutre dehors.


Les mots résonnaient encore dans mes oreilles tandis que je fixais Hadès, qui tremblait sur le lit, sans comprendre ce qui venait de se passer. Mais moi, je comprenais. Et je savais que je n’avais pas le choix.

La peur m’a noué l’estomac, mais elle s’est vite transformée en quelque chose d’autre. Une rage sourde a commencé à monter en moi alors que je sortais de la maison avec Hadès dans les bras. Je l’ai emmené loin, jusqu’à ce terrain vague où personne ne viendrait nous chercher. Le vent soufflait fort, soulevant la poussière autour de nous, et je me suis arrêté au milieu des débris, le chat toujours contre moi. Il me regardait avec ses grands yeux innocents, mais cette fois, il n’y avait plus de chaleur dans ce contact.


Sans un mot, mes doigts se sont refermés autour du cou fragile d'Hadès. Le souffle court, j'ai senti son corps minuscule se raidir, une vague de panique foudroyant ses muscles tendus. Ses petites pattes griffaient l'air, cherchant désespérément à attraper quelque chose, n'importe quoi, pour se libérer. Ses griffes effleuraient ma peau, mais la douleur n'était qu'un murmure lointain. Chaque spasme, chaque soubresaut sous ma poigne me renvoyait une vague de chaleur glaciale, une énergie sombre qui montait en moi. Ses yeux, ces mêmes yeux qui me fixaient avec curiosité quand je l’avais trouvé, s'élargirent, suppliants, un éclat de terreur pure dilaté dans ses pupilles.


Mais au lieu de reculer, je serrais davantage. Plus il se débattait, plus une satisfaction morbide se répandait dans mes veines, un frisson insidieux grimpant le long de ma colonne vertébrale. Je pouvais sentir la vie lui échapper lentement, un souffle ténu, comme un fil qui se détend, prêt à se rompre. Ma vision se rétrécissait, centrée sur ce corps qui luttait contre l’inéluctable, un spectacle à la fois terrifiant et envoûtant. Un rictus involontaire tordit mes lèvres alors que je plongeais mon regard dans le sien, fascinée par l'idée d'avoir ce pouvoir absolu. C’était là, au creux de ma main, cette force destructrice que je n'avais jamais osé imaginer. Quelque chose en moi se fissurait, comme un miroir craqué laissant filtrer une noirceur que je ne contrôlais plus.


Puis, soudain, tout s’est arrêté. Plus un mouvement, plus un souffle. Hadès pendait, inerte, ses pattes autrefois si vives désormais retombées sans vie. Un silence pesant envahit l’air, étouffant même les battements précipités de mon cœur. Un vide glacial s’étendit en moi, là où l’innocence résidait autrefois. Le monde bascula sur son axe, et je compris alors que quelque chose en moi venait de mourir avec lui. Je l’ai relâché brusquement, jetant son corps inerte loin de moi, comme si ce geste pouvait effacer ce que je venais de faire. Sans un regard en arrière, j’ai rebroussé chemin, la tête vide mais le cœur lourd.

En rentrant, la porte grinça dans le silence de la maison. Mon père était là, planté au milieu du couloir, les bras croisés, un rictus de dédain tirant les coins de sa bouche. Ses yeux, ces mêmes yeux froids qui m'avaient traqué toute mon enfance, me transperçaient comme des lames de glace.


Je me suis arrêté, sentant une vague brûlante monter en moi, un flot acide qui bouillonnait au creux de ma poitrine. Chaque muscle de mon corps se tendait, mes poings se refermant jusqu'à ce que mes ongles mordent la paume de mes mains. Il attendait une réaction, une once de peur, ce frisson familier qui me parcourait d'habitude sous son regard. Mais cette fois, c’était différent. Lentement, j’ai levé les yeux vers lui, le défi brûlant dans mes pupilles. Ma mâchoire se serra à s’en faire mal, tandis que l’écho des insultes, des coups, des hurlements résonnait dans mon crâne, chaque souvenir attisant la braise d’une colère que je ne pouvais plus contenir.


Un silence lourd s’étira entre nous, chargé de cette haine sourde, viscérale, qui grondait sous ma peau. Je le fixais avec une intensité froide, le souffle court, comme un prédateur jaugeant sa proie. Pour la première fois, je le voyais pour ce qu’il était vraiment : un homme faible, petit, qui n’avait jamais eu d’autre pouvoir que celui de me terrifier. Une satisfaction sombre, presque cruelle, glissait sur ma langue alors que je soutenais son regard, refusant de baisser les yeux. Il n'y avait plus de peur, seulement cette rage contenue qui, à cet instant, m'enivrait. Un mince sourire se dessina sur mes lèvres, une ombre de triomphe.


Je savais que quelque chose avait changé, que ce n’était plus lui qui dictait les règles. Alors, je l’ai regardé droit dans les yeux et j’ai murmuré, glacé d’une certitude froide :

— Tu vois, papa, maintenant c’est moi qui décide quand ça s’arrête.


À ce moment-là, j’ai compris que je ne serais plus jamais à sa merci. Il est resté figé, incapable de bouger, comme s’il réalisait enfin la noirceur qui s’était enracinée en moi. Les mots se dissipent dans l’air, laissant un silence lourd entre nous. Je sens son regard encore posé sur moi, mais il ne dit rien. Je n’ai plus besoin de le regarder pour savoir qu’il a compris.

Fin du flashback

Je me détache alors de ce souvenir et reviens lentement à la réalité. Mon corps est glacé, chaque battement de cœur faiblit, chaque souffle devient plus laborieux. Je sens mon dernier souffle se préparer, fragile et hésitant. Et cette fois, j’accueille la mort sans crainte, comme une délivrance tant attendue, la seule véritable échappatoire à l’ombre qui m’a consumé toute ma vie.

 
 
 

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